On 'Incendies' and the quiet strength of pioneering Québécois director Denis Villeneuve
The latest episode of The Filmmakers looks back his Oscar-nominated thriller
This is part of a series of essays by panellists featured on the new CBC Arts talk show The Filmmakers. A panellist from each episode writes about the film being featured this week, which this week is Radio-Canada writer and producer Helen Faradji discussing Denis Villeneuve's Incendies, with the essay translated in both English and French. You can watch Faradji alongside Toronto International Film Festival artistic director Cameron Bailey and film producer Niv Fichman in the above video, and watch the entire episode this Saturday at 9pm (9:30pm NT) on CBC Television or online at cbc.ca/watch.
The film that changed everything for Denis Villeneuve and gave wings to Quebec cinema will air after this weekend's episode of The Filmmakers.
Is there something in the water in Quebec? Are the stars aligned in a particular way? Or is it simply that, submerged in a sea of English-language films, Quebec cinema has always had to be that much more creative, daring and inventive in order to make its mark?
The answer is probably a bit of all the above. When Denis Villeneuve presented Incendies in 2010, he perhaps embodied more than anyone else that year the idea of Quebec cinema as strong, open to the world, generous and ambitious — a cinema built on solid stories and bold directing. Since Incendies received an Oscar nomination for best foreign language film (nominations for Monsieur Lazhar by Philippe Falardeau and Rebelle by Kim Nguyen would soon follow), Villeneuve has been unstoppable, enjoying a dazzling international career. It is easy to see why Incendies was the catalyst.
This adaptation of a violent, sensual, existential, intimate and political play — portraying the destiny of two twins instructed by the letters of their deceased mother to find their father and brother, of whose existence they were unaware — attests to a quiet strength in Denis Villeneuve that is undeniable and irrefutable. It is like a powerful, hypnotic wave that nothing can resist. The task may seem simple, but required an audacity on the part of the young filmmaker who, up until that point, had had trouble proving he was more than just a talented stylist.
It was no mean feat to take on a story as complex, dense and tragic as that created by Quebec-Lebanese playwright Wajdi Mouawad. A story that travels between the present and the recent and distant past, between Montreal and a Lebanon that is not identified but that has been scarred by years of war and tension. A story told in French and Arabic, led by a woman. A story with an astonishing conclusion (1+1=3!), inviting profound reflection on the idea of resilience in the face of an increasingly brutal human savagery.
Is there something in the water in Quebec? Are the stars aligned in a particular way? Or is it simply that, submerged in a sea of English-language films, Quebec cinema has always had to be that much more creative, daring and inventive in order to make its mark?- Helen Faradji
It took courage to create a wide-ranging, arrestingly calm mise-en-scène within the terrifyingly beautiful landscapes of Jordan. With the exception of a few slow-mo sequences and moments accompanied by "You and Whose Army?" by Radiohead, the story unfolds in a manner that seems natural and organic. It is a setting in which the film's characters, who are strong, contradictory and compelling, can reveal themselves little by little, in a powerful fresco where the personal and collective continually intersect.
Denis Villeneuve also dared to venture where others before him had not thought to go, eliciting strong emotions and showing that a pacifist, feminist film like this makes for truly great cinema. Lubna Azabal turns in a heart-rending, exemplary performance as a courageous mother, proving through her remarkable force of character that integrity and intelligence can triumph over the horrors of war. Her daughter (the moving Mélissa Désormaux-Poulin) is active, determined and dynamic, in contrast with her twin brother (Maxim Gaudette), who is paralyzed by anger and sadness. The women in this film are strong, at times uncompromising and richly complex. They lead the way, through all storms.
Denis Villeneuve has since directed Arrival, among others, and Blade Runner 2049 will be coming out soon. But Incendies is the film that sealed his reputation as a filmmaker of remarkable confidence and humility. It is a rare and striking combination that comes through in his work, time and again.
Est-ce quelque chose de spécial dans l'eau du Québec? Une disposition des étoiles particulière? Ou simplement le fait que depuis toujours, pour s'affirmer et exister dans un océan de films anglophones, le fort peu fortuné cinéma québécois a toujours dû, un peu plus que les autres, faire preuve d'ingéniosité, d'audace, d'inventivité?
Probablement un peu de tout ça. Toujours est-il que lorsque Denis Villeneuve a présenté Incendies en 2010, il incarnait peut-être plus que quiconque cette année-là cette idée d'un cinéma québécois fort, ouvert sur le monde, généreux, ambitieux. L'idée d'un cinéma tissé à la fois de récits forts et de mises en scène pleines de cran. Une nomination à l'Oscar du meilleur film étranger plus tard (suivi l'année suivante à cette place par Philippe Falardeau et Monsieur Lazhar, puis la suivante par Kim Nguyen avec Rebelle) et une carrière mondiale éblouissante lancée et que rien ne paraît pouvoir limiter, il est toujours facile aujourd'hui de voir pourquoi Incendies a pu être ce fer de lance.
C'est que cette adaptation d'une pièce de théâtre, violente, charnelle, existentielle, intime et politique, évoquant le destin de deux jumeaux chargés par des lettres de leur mère défunte de trouver leur frère et leur père, dont ils ne soupçonnaient pas l'existence, parvient à témoigner d'une force tranquille indéniable. Évidente. Irréfutable. Comme une vague, hypnotique et profonde, à laquelle rien ne peut résister. Cela peut paraître simple, mais demandait toutefois toute une hardiesse de la part du jeune cinéaste qui, jusqu'ici, avait eu du mal à convaincre entièrement au-delà de son talent de styliste.
Celle d'abord de s'attaquer à une histoire aussi complexe, touffue, tragique que celle imaginée par le dramaturge libano-québécois Wajdi Mouawad et qui se balade entre un présent, un passé proche et un autre lointain, entre Montréal et un Liban non identifié mais scarifié par des années de guerre et de tension. Le tout, en français et en arabe. Porté par une femme. Et dénoué par un revirement hallucinant (1+1=3!) qui ouvre la porte à une réflexion profonde et bouleversante sur l'idée de résilience, face à une sauvagerie humaine de plus en plus brutale.
L'audace encore d'oser façonner une mise en scène ample et d'un calme saisissant qui profite de la beauté terrifiante des décors naturels de Jordanie et dont chaque instant (excepté quelques ralentis ou moments accompagnés de la chanson You and Whose Army? de Radiohead) semble organique et naturel. Un écrin pour que ses personnages, forts, contradictoires et passionnants, se dévoilent et se révèlent peu à peu, dans une fresque puissante où se rencontrent sans cesse le plus personnel et le plus collectif.
Est-ce quelque chose de spécial dans l'eau du Québec? Une disposition des étoiles particulière? Ou simplement le fait que depuis toujours, pour s'affirmer et exister dans un océan de films anglophones, le fort peu fortuné cinéma québécois a toujours dû, un peu plus que les autres, faire preuve d'ingéniosité, d'audace, d'inventivité?- Helen Faradji
Car, l'autre audace de Denis Villeneuve, c'est aussi celle d'avoir imposé, dans un paysage cinématographique qui n'osait peut-être pas autant avant lui penser ses films comme des œuvres dignes des grands écrans et des grandes émotions, un si grand film pacifiste et féministe. Féministe oui, car le portrait de cette mère-courage (déchirante Lubna Azabal), capable par une force de caractère hors du commun de faire triompher la droiture et l'intelligence du cœur sur les horreurs de la guerre, est exemplaire. Comme l'est celui de sa fille (Mélissa Désormaux-Poulin, touchante), active, déterminée, fonceuse, toute en contraste face à son frère jumeau (Maxim Gaudette), incapable de réagir, tétanisé par la colère et la tristesse. Les femmes, fortes, intransigeantes parfois, mais riches, mènent. Dans toutes les tempêtes.
Depuis, il y a eu entre autres Arrival. Et il y aura Blade Runner 2049. Mais Incendies ne laissait aucune place au doute. Denis Villeneuve est un cinéaste dont l'assurance n'a d'égale que l'humilité. Un mélange aussi rare que percutant. Et qui n'a, depuis, eu de cesse de se confirmer.
Watch The Filmmakers this Saturday at 9pm (9:30pm NT) on CBC Television or online at cbc.ca/watch, followed by Denis Villeneuve's Incendies.